Éclectiques et complémentaires, les trois retours d’expérience qui ont rythmé le programme du REX BIM Tour d’Île-de-France ont donné à voir différentes utilisations du BIM, à différentes échelles. Jeudi 1er avril, la présentation du chantier en cours à Saint-Ouen, a ainsi permis de pointer les atouts et les limites du BIM sur une opération XXL. 2021Ile-de-FranceREX
555 logements, répartis dans 5 bâtiments, complétés de 2 niveaux de parking et agrémentés d’espaces paysagers : le projet de l’îlot n°7 de la ZAC des Docks, en bord de Seine, à Saint-Ouen est ambitieux, non seulement par ses dimensions, mais aussi en termes de performance énergétique. Situé au cœur d’une ancienne friche industrielle reconvertie en éco-quartier, « l’ensemble immobilier devra respecter des exigences équivalentes à la norme RE 2020, obtenir le label NF Habitat HQE niveau excellent ou encore s’inscrire dans la démarche Effienergie +, a donné pour exemple Julien Garnier, directeur de CARDONNEL Ingénierie. Ces différents labels environnementaux garantissent des niveaux de confort importants. »
Découper en plusieurs maquettes
Pour mener à bien cette opération complexe, le maître d’ouvrage, Nexity, novice en BIM, a fait appel à un maître d’œuvre expérimenté : « Depuis 2012, nous faisons tous nos projets en BIM, a expliqué Vivian Cloez, architecte chez ARTE Charpentier. Mais ici nous sommes allés plus loin, en déployant un BIM niveau 2, dès la conception. » « Ce qui signifie que nous avons travaillé avec tous les acteurs du projet sur une maquette partagée, a indiqué Jean-Frédérick Loko, architecte et référent BIM de l’agence ARTE Charpentier. Mais vue l’ampleur du projet, nous avons dû découper la maquette en fonction des besoins. » C’est ainsi que les architectes ont travaillé sur 12 maquettes numériques différentes et les bureaux d’études sur 27 maquettes, avec les lots chauffage-ventilation-climatisation, fluides, électricité... « Ce travail de découpage a été essentiel pour bien démarrer, a insisté Jean-Frédérick Loko. Ensuite architectes et bureaux d’étude ont travaillé avec le même logiciel, REVIT, ce qui a beaucoup simplifié les choses. » Un logiciel commun, un point de rencontre pour mettre à jour la maquette, sur la plateforme KROQI, et une convention BIM bien ficelée, tels ont été les piliers de ce projet collaboratif, rassemblant des acteurs de maturité BIM variée.
Gain de temps
Spécialisés en thermique des fluides, les professionnels du bureau d’études CARDONNEL Ingénierie, qui sont intervenus dans le cadre d’une mission d’assistance aux certifications environnementales, ont découvert, pour nombre d’entre eux, le BIM à l’occasion de ce projet. Rétifs au changement, comme souvent, ils ont très vite pris la mesure des économies en temps générées par les atouts de la maquette numérique, pour calculer le facteur de lumière du jour dans les différentes pièces, pour effectuer des simulations thermiques complexes, en fonction de la volumétrie des espaces et de la physionomie des façades, ou encore pour évaluer la part de matériaux biosourcés par mètre carré de plancher et le bilan carbone de la construction. « Même si des progrès sont à faire pour que la modélisation de la maquette prenne en compte les contraintes des thermiciens, on gagne beaucoup de temps », a résumé Julien Garnier.
Conduite du changement
Une fois passé, chez tous les intervenants, le temps des questions et des inquiétudes liées au basculement dans la dimension 3D du BIM, tous reconnaissent qu’il s’agit d’une petite révolution qui interdit tout retour en arrière : « On s’est heurté à des problématiques d’import-export, de format de fichiers que personne n’avait envie de régler, se souvient Julien Garnier. Il m’a fallu prendre mon bâton de pèlerin pour les convaincre tous de ne pas jeter l’éponge, mais au final les équipes ont compris que le BIM leur évite les tâches fastidieuses. » Efficacité, rapidité, fluidité des échanges, montée en compétence des équipes, les architectes dressent le même bilan globalement positif. Tout en traçant des perspectives de progrès, pour mieux définir, notamment, le rôle du BIM Manager et les attentes de chaque acteur : « Le maître d’ouvrage doit par exemple anticiper les usages qu’il entend faire de la maquette, a souligné Vivian Cloez, pour que la modélisation intègre les bons paramètres. » Au-delà des enjeux technologiques, le dialogue et la relation humaine restent donc la clé de réussite du BIM. Un constat à méditer d’ici les prochaines étapes du REX BIM Tour 2021, le 10 juin à Orléans, le 12 octobre à Dijon, le 9 novembre à Rouen et le 7 décembre à Lille.