Pour sa sixième étape depuis son lancement en 2018 et sa première édition de l’année 2020, le REX BIM Tour a fait escale à la Saline-les-Bains, sur la côte ouest de l’île de La Réunion. Il y a enregistré un record d’affluence avec 230 participants. La Saline-les-bains
« Malgré la chaleur, la Fédération Cinov a réussi à réunir la grande famille réunionnaise de l’acte de bâtir, ce qui n’est pas courant », s’est réjoui, en ouverture, Jean-Fabrice Vandomel, le président de la Fédération Cinov Réunion-Mayotte. Maîtres d’ouvrage, architectes, bureaux d’études, étudiants : quelque 230 personnes se sont penchées, jeudi 5 mars après-midi, sur les enjeux de formation en matière de BIM, avant de donner la parole aux expérimentateurs locaux de cette démarche innovante.
Formation : offre et freins
Tandis qu’au Centre d’innovation et de recherche du bâti tropical (CIRBAT), les matinées organisées depuis fin 2019 visent avant tout à « démystifier le sujet », comme l’a indiqué son directeur, Alçay Mourouvaye, le CNAM (Conservatoire des arts et métiers) de La Réunion propose de son côté des formations très pointues à des étudiants titulaires de licences ou de diplômes d’ingénieurs. En formation initiale comme en formation continue, « l’accès à ces compétences constitue un vrai enjeu » a insisté Alçay Mourouvaye. Ce qui explique les efforts faits à La Réunion pour introduire le BIM dans les cursus : « Nous formons 120 professeurs par an dans toutes les filières du BTP, a indiqué Patrice Lauriol, inspecteur de l’Education nationale. Et le BIM est désormais omniprésent dans tous les sujets d’examen, ce qui ne laisse aucune place à l’improvisation. »
L’offre de formations ne garantit pas pour autant que les professionnels de « l’acte de bâtir » y auront recours, tant les réticences restent nombreuses. La difficulté de détacher des salariés pour qu’ils se forment est, tout d’abord, réelle pour les petites structures. « Beaucoup de chefs d’entreprises s’interrogent sur le retour sur investissement de ces formations, a témoigné Amand Bénard, directeur du CNAM La Réunion. Et pourtant, nous mettons en place des modalités pédagogiques adaptées à leurs contraintes. » Le coût constitue un autre frein : « Il faut compter 20 000 euros pour former au BIM un dessinateur-projeteur, a donné pour exemple Frédéric Bœuf, directeur du bureau d’études Seba Expert Sans compter ensuite l’achat de nouveaux matériels et de logiciels. »
Pour encourager la montée en compétence sur le BIM, Dominique Thévenin, nouveau référent de l’OPCO Atlas à la Réunion, a invité les participants au REX BIM Tour à faire « remonter leurs besoins pour que soit développé un vrai plan de formation dans le département. » Pour limiter ainsi le recours très couteux aux modules qui sont uniquement proposés en Métropole.
De la théorie à la pratique
Selon la recette désormais bien rodée du REX BIM Tour, aux échanges théoriques des tables rondes a succédé le temps des retours et échanges d’expérience. Parmi les projets présentés, le plus emblématique concerne l’aéroport Réunion Roland-Garros, principale portée d’entrée sur le territoire. Le recours au BIM va permettre de mettre aux normes l’installation de filtrage des bagages et de créer une autre aérogare – aux caractéristiques bioclimatiques - pour être en mesure d’accueillir jusqu’à 4 millions de passagers par an. « La clé du succès de ce projet-là, a confié Vincent Beaudemoulin, dessinateur projeteur du bureau d’études INSET, c’est que la maitrise d’œuvre a une certaine expérience et que le maitre d’ouvrage est moteur, même si tout le monde n’a pas le même niveau de maturité. » Quels que soient les projets présentés, à La Réunion comme dans les étapes précédentes du REX BIM Tour en métropole, les différents niveaux d’appropriation du BIM, de même que les problèmes d’interopérabilité (c’est-à-dire de compatibilité entre les logiciels utilisés) font partie des principaux obstacles rencontrés par les acteurs qui veulent se frotter à cette démarche innovante. Des facteurs de complexité qui ont inspiré la conclusion de Frédéric Lafage : appliquant au BIM la maxime cornélienne selon laquelle « à vaincre sans péril on triomphe sans gloire », le président de la Fédération Cinov a estimé que « la facilité est une plus grande menace au progrès que toutes les difficultés à surmonter. » Un réel encouragement à persévérer.