Pour sa 5ème étape virtuelle, le REX BIM Tour « à la mode zoom » a donné la parole,
jeudi 9 juillet 2020, à deux professionnels rompus au BIM, un architecte et un gérant
de bureau d’études. A travers la présentation de trois projets, Guillaume Zilio et Camille
Bouchon ont mis en avant différents atouts du BIM.
REXZoom
Modéliser quelle que soit la complexité
Pour le projet de réhabilitation de 1 000 m², au second étage du Centre d’interprétation du patrimoine architectural à Strasbourg, situé dans un bâtiment historique, le cabinet Nunc Architectes a pris l’initiative de recourir au BIM, pour une modélisation optimale de l’existant. Pour ce projet d’1,6 M €, l’équipe de maîtrise d’oeuvre a dû relever des défis techniques et coopératifs. « Sur les façades, une partie de notre travail a été de faire en sorte que notre gabarit corresponde à nos habitudes de dessin, a donné pour exemple Guillaume Zilio, architecte. Il fallait qu’on puisse retrouver notre graphisme à l’écran, ce qui a représenté un gros travail. » Si les architectes ont pu réaliser des plans très explicites à destination des entreprises, pour qu’elles voient précisément ce qui serait conservé, démoli, refait, la question de la fluidité des échanges s’est posée. « Les entreprises sont encore en plans 2D, a expliqué Camille Bouchon, il faut donc que les informations de la 3D soient adaptées aux plans 2D pour éviter les erreurs et garantir que le projet architectural soit bien réalisé. » En outre, le projet a bien prouvé qu’il fallait savoir trier les informations, pour qu’elles soient utiles aux bons interlocuteurs au bon moment.
À chaque phase son BIM
L’exemple de la maison de l’enfance à Weitbruch – une opération labellisée « bâtiment passif », pour ses performances thermiques, et « E+E- » pour son bilan carbone – a permis aux deux professionnels de détailler les attendus de la maquette BIM aux différentes phases de la vie d’un projet (phase esquisses, APS, APD, EXE, PRO). Dès la phase APD, qui constitue le premier rendu de plan, de premiers problèmes de collusion de réseaux peuvent apparaître, « à ce moment-là, le BIM est un outil qui a une dimension pédagogique qui peut débloquer des situations parfois conflictuelles », a témoigné Camille Bouchon. Mais les images diffusées par les intervenants ont bien montré que la précision des plans s’enrichit par la suite, après l’APD : « En phase EXE, la représentation n’est pas encore exploitable par les entreprises ». « L’expérience nous a confirmé qu’il ne faut pas rentrer trop d’informations tout de suite, a considéré Guillaume Zilio. Il faut être raisonnable et procéder étape par étape. » Dans un projet comme celui de Weitbruch, la phase PRO a enfin permis – grâce à une synthèse extrêmement rigoureuse - de vérifier les problèmes de croisement et d’épaisseur induits par l’ossature en bois. « Ce qui est intéressant dans le BIM, c’est de continuer jusqu’au bout la même maquette, a conclu Camille Bouchon, pour ne pas avoir de ruptures sur les usages. »
Un travail collaboratif à distance
La construction de 128 logements à Aubervilliers a constitué une opération importante pour la maîtrise d’oeuvre (10 250 m2 et 15 M€ de budget), à réaliser de surcroît dans des délais courts. « Le pôle parisien qui porte le projet a eu besoin d’un coup de main de la part du pôle alsacien, a souligné Guillaume Zilio. Il a donc fallu mettre en place un travail en commun, depuis plusieurs sites, en utilisant le même modèle. » Une contrainte qui exige le recours à des outils très puissants, une répartition des tâches rigoureuse (ici en fonction des secteurs du projet) et la nomination d’une personne chargée d’organiser le travail des uns et des autres. « Ça nécessite que tout le monde travaille de la même façon et utilise les mêmes objets, a précisé Guillaume Zilio. Nous avons utilisé la plateforme mise à disposition par Autodesk pour stocker la maquette, mais cela demande des connexions Internet robustes, une organisation et un coût importants. Presque dissuasifs ! ».
Zoom
sur...
Comment Solares Bauen et Nunc Architectes ont-ils basculé dans le BIM ? Quel bilan tirent-t-ils de cette transition ?
Bureau d’études franco-allemand spécialisé dans l’ingénierie des fluides, Solares Bauen emploie une
quarantaine de personnes à Fribourg, une trentaine et à Strasbourg. En 2014, le BET décide de se lancer dans
BIM pour plusieurs raisons : « Tout le monde commençait à en parler et nos collègues allemands utilisaient
déjà des outils poussés de gestion de la 3D, raconte Camille Bouchon, gérant de Solares Bauen. Après avoir
longtemps freiné, on s’est dit qu’il fallait suivre l’air du temps ». Quatre collaborateurs sont alors formés à
l’utilisation de REVIT. La principale difficulté à l’époque tient au manque d’architectes capables de travailler en
BIM…
La rencontre avec le cabinet Nunc Architectes est alors décisive. Installé à Strasbourg, Saint-Brieuc, Chambéry
et Paris, cette agence compte huit associés et une trentaine de collaborateurs. « Nous avons commencé à
envisager de muter vers le BIM à partir de 2012, se souvient Guillaume Zilio, architecte chez Nunc architectes
et enseignant à l’INSA de Strasbourg. Notre logiciel historique commençait à dater et nous ne voulions pas
rester dans le passé. En 2015, nous avons décidé de basculer tous nos projets en BIM. » Dix-huit architectes
sont alors formés, ce qui crée « une émulation au sein de l’équipe, note Guillaume Zilio, même si les premières
années ont été compliquées car nous étions moins à l’aise avec ces nouveaux outils. »
Puis chacun a pris de nouvelles habitudes et un effet générationnel a aussi joué, selon Camille Bouchon :
« Alors qu’au début nos projeteurs n’étaient pas formés en BIM ; ceux que nous embauchons aujourd’hui
ne sont pas formés à Autocad ! La difficulté maintenant va être pour eux de concilier connaissances
informatiques et connaissances métier, pour que l’outil ne prenne pas le dessus sur le technique. »
Cinq ans après s’être lancé dans le BIM, Solares Bauen a mené 13 projets BIM, pour un budget cumulé de 85
M€ ; Nunc Architectes en compte 19 à son actif, pour un budget global de plus de 110 M€.
UNE QUESTION DE LA SALLE
Avez-vous déjà collaboré avec un bureau d’études en acoustique
sur la conception d’un projet en BIM ?
« Aujourd’hui, quand on se promène dans une maquette 3D, on a une
restitution de la lumière mais pas des ambiances sonores, je pense que cela va
se développer et devenir un outil en matière d’acoustique », a estimé Guillaume
Zilio